Naissance du film

Les dessins / storyboard

La séquence de fin

Itinéraire du film

Le dossier pour Arcadi

Photogrammes

 

Sébastien Laudenbach >

Je raconte tellement souvent cette histoire qu'aujourd'hui je ne suis même pas sûre qu'elle soit vraie. J'ai la tendance à rendre les choses rétrospectivement plus riches et intéressantes de ce qu'elles ne l'étaient en réalité. C'est pour ça d'ailleurs que je fais des films. Je peux raconter des histoires à partir de ce que je vis sans forcément passer pour une menteuse qui délire.

L'Isle naît de ce désir de raconter la réalité pour la fuir aussitôt.

Avec Sébastien on se connaissait depuis quelques temps : c'était le grand amour. J'avais décidé cet été 2003 de retourner en Italie pour les vacances. Il se trouve qu'un ami réalisateur m'a demandé de travailler comme assistante réalisatrice/deuxième camera, sur le documentaire qu'il tournait à Lampedusa*, une île au sud de la Sicile. C'était l'occasion de travailler et d'être en vacances au même temps. Sébastien connaissait peu l'Italie ; au début de l'été il venait d'apprendre qu'il pouvait faire son film, Des câlins dans les cuisines .

Nous décidons d'y aller ensemble, avec sa table lumineuse, des milliers de feuilles de papier, un appareil photo numérique, un trépied et des crayons...J'apprends qu'un film d'animation peut aussi se faire comme ça : en déplacement. L'important c'est la constance de qui le réalise ; si la constance ne bouge pas, tout va bien.

A Lampedusa on était installé tous les trois dans un appartement pas loin de la mer : le matin je partais filmer les pêcheurs et Sébastien se mettait torse nu, devant sa table lumineuse, jusqu'à soir. Nous avons peu profité de la mer cet été là. Mais on a fait deux films.

Un jour j'avais besoin de faire un test camera et j'ai filmé Sébastien au travail.

Il y avait une lumière extraordinaire qui venait de la table lumineuse. C'était un plaisir de le filmer. Moi, venant du documentaire, habituée à courir après des choses qui risquent de s'en aller à tout moment ; et là, pour une fois, je pouvais vraiment prendre le temps de regarder, un temps qui m'était donné comme ça, sans obligation, sans risque. Sébastien était là pour moi, assis, présent, dans la longueur. Je pouvais prendre le temps de le filmer. Notre relation qui venait de naître se tissait sur ce jeu de regards croisés entre réalisateurs au travail. Si j'essaye de trouver le moment où je me suis dit que tout ça pouvait devenir un film c'est peut être quand j'ai soudain vu apparaître sous le crayon de Sébastien, alors que je le filmais, un petit dessin nous représentant lui et moi, m'enjoignant à sortir prendre un verre.

C'est là que je me suis dit qu'une aventure d'amour en dehors de cet appartement pouvait passer sous forme de dessins, et accompagner la documentation minutieuse et amoureuse que j'étais en train de faire sur son travail.

* Rimini Lampedusa Italia, un film de Marco Bertozzi, dvcam 74', Italie 2004. En compétition au Torino Film Festival la même année.

 

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